L’enseignement à distance – un atout pour l’école de demain ?
L’arrivée d’une pandémie ayant forcé les personnes à vivre, travailler, enseigner et apprendre dans un confinement a bousculé l’enseignement ordinaire et a permis aux nouvelles technologies de se faufiler dans chaque ménage et de forger de nouveaux moments d’apprentissage. Certes, l’utilisation d’un espace virtuel pour pouvoir voir et discuter avec ses élèves était le seul moyen de garantir la formation. Mais cet espace permettant un enseignement à distance saura-t-il persister après la levée du confinement et le retour en salles de classe des élèves ?
La chronologie
Au Luxembourg, la suspension des cours a débuté le 16 mars. L’annonce de cette décision a été faite un jeudi, de manière à ce que les enseignants aient encore le temps de préparer leurs élèves à l’enseignement à distance, prévu alors pour deux semaines.
Deux jours plus tard, le 18 mars, l’annonce tombe : les établissement scolaires et d’autres infrastructures liées resteront fermés jusqu’au 19 avril. Pendant cette période un nouveau site web et une helpline ont été mis en place afin de soutenir les élèves, les enseignants et les parents durant cette période de Homeschooling.
Le 2 avril, la suspension des cours est prolongée jusqu’au 4 mai pour les classes terminales, au 11 mai pour les autres classes de l’enseignement secondaire et jusqu’au 25 mai pour les élèves de l’école fondamentale. Le retour en classe se fera en alternance et dans le respect des mesures sanitaires. D’ici là, l’enseignement à distance devra être garanti.
Les médias à l’école
Bien que le ministère de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse promeuve dès le début de la rentrée scolaire 2019/2020 le coding et les nouvelles technologies avec l’introduction d’un Medienkompass à l’école, la réalité sur le terrain est bien différente. Si certains enseignants travaillent avec des iPad, proposant aux élèves de faire des recherches sur internet et/ou utiliser des applications pour écrire, lire, s’enregistrer, faire des calculs, des dessins etc., d’autres, continuent à faire leurs cours. La suspension des cours a bousculé la pratique des enseignants.
Même si au début du confinement, certains enseignants préparaient des enveloppes, faisaient des copies des devoirs et des exercices pour les élèves, l’annonce de la prolongation des cours a permis respectivement a forcé tous les enseignants à aborder les nouvelles technologies. L’envoi de copies se poursuit cependant, pour les élèves qui n’ont pas accès aux nouvelles technologies depuis la maison.
L’introduction d’Office 365 en 2015 par le ministère a permis à tous les enseignants et élèves d’avoir accès gratuitement à un environnement numérique de production et de collaboration. Cet environnement numérique a connu un vrai boom dès le début de la suspension des cours. Grâce à la plateforme ,,Teams’’, les enseignants ont pu se concerter entre eux, lancer des vidéo-conférences avec les élèves et les parents, produire des séquences de cours enregistrées et collaborer encore plus étroitement dans la production de matériel, par exemple. Tout cet espace d’enseignement virtuel a créé des opportunités au niveau de l’apprentissage différencié, autoguidé et autonome, même s’il provoquait en même temps des inquiétudes et des inégalités.
Les effets de l’enseignement virtuel
La recherche sur les effets de l’enseignement à travers un espace virtuel sur les capacités des élèves est contradictoire : certains chercheurs ont pu démontrer qu’un nombre important d’élèves échouent alors que d’autres chercheurs ne peuvent confirmer ces résultats. (Reich, 2020). Tous semblent quand même être d’accord sur le fait que les élèves qui travaillent aisément en classe, arrivent à continuer leur apprentissage de la même manière à la maison.
,,Students who do fine anywhere tend to do fine online. But the online penalty is more severe for vulnerable and struggling students—students with low prior achievement or from disenfranchised ethnic and racial groups.’’ (Reich[1])
Les difficultés concernent souvent des élèves qui avaient déjà du mal à suivre pendant les temps normaux. Ces nouvelles difficultés peuvent être liées à de nombreux facteurs : parents qui travaillent, manque de temps ou de capacité pour se consacrer à l’enseignement, accès réduit ou inexistant à des nouvelles technologiques, etc.
S’il est encore trop tôt pour déterminer les réelles conséquences de cette période sur l’apprentissage des élèves, de nombreuses études sont en cours, nous pouvons ainsi citer l’Université du Luxembourg[2], ou la School of education and social work de Birmingham[3]. Par ailleurs, un rapport de l’Association internationale des universités sur l’impact du Covid sur l’enseignement supérieur a déjà été publié[4]. Enfin, de nombreux spécialistes en éducation ont par ailleurs fait entendre leur voix à travers des interviews (Anna Canato[5], Florian Lascroux[6]) ou des articles (Céline Darmon[7])
Et maintenant ?
Étant donné qu’il faut bien sûr retourner dans les salles de classe à un moment ou à un autre, afin de garantir un meilleur accompagnement des élèves dans leur apprentissage, surtout pour les élèves en difficulté, la question se pose sur la durabilité de l’enseignement à distance par le biais des nouvelles technologies. Est-ce que, dès le retour en classe, l’utilisation de la plateforme Teams va s’écrouler ? Ou est-ce que ce moyen de collaboration, de partage pourra résister à la reprise des cours ? Une chose est certaine : il faudra prendre le temps de passer en revue le vécu, en tirer des leçons et les appliquer afin de re-construire un système d’éducation qui déjà auparavant, n’était pas parvenu à établir une éduction équitable.